La Mie de Pain est depuis sa naissance implantée dans le 13ème arrondissement de Paris. Il faut avoir à l’esprit qu’il y a plus d’un siècle, cet arrondissement était celui des ouvriers et des miséreux. Un grand nombre de tanneurs et de chiffonniers y était installé, La Bièvre* traversant plusieurs quartiers du 13ème. De par ce passé, cet arrondissement est aujourd’hui encore l’un de ceux qui accueille le plus d’œuvres de charité sur la place de Paris.
Paulin Enfert, un homme au service des plus pauvres
Aux origines de La Mie de Pain, il y a un homme : Paulin Enfert (1853-1922). Né à Nevers, il est le second enfant d’une famille modeste. En 1857, il arrive avec sa famille à Paris. Son père, corroyeur de profession, s’installe dans le 13ème arrondissement et dirige le moulin à tan** sur La Bièvre, dénommé Le Moulin des Près. Élevé dans la religion catholique, Paulin Enfert fréquente l’école communale dirigée par Les Frères des Écoles Chrétiennes jusqu’à son adolescence.
En 1871, alors âgé de 18 ans, Paulin Enfert assiste au spectacle des luttes fratricides de La Commune. Ces événements marquent profondément le jeune homme. Ils vont contribuer à forger sa vocation et seront l’un des catalyseurs de ses engagements et actions futurs.
Après son service militaire, Paulin Enfert commence à se produire dans les cercles catholiques ouvriers et autres œuvres catholiques de jeunesse de l’époque. Il y organise des spectacles de prestidigitation où il excelle.
En 1885, devenu adulte, il se fait employer à la Compagnie des Assurances Générales où il travaillera plus de 40 ans. A partir de cette année-là, Paulin Enfert consacre tout son temps libre à ses œuvres de charité.
Les origines : le Patronage Saint-Joseph de la Maison Blanche
Paulin Enfert rassemble les enfants désœuvrés du quartier de la Maison Blanche, quartier très pauvre du 13ème à l’époque. Il les instruit, leur enseigne le catéchisme, leur propose des jeux, « tout pour les sortir de la rue ». Seule une roulotte de nomade leur sert d’abri. Paulin conquiert vite le cœur des jeunes. Ne serait-ce que par son bagou et ses talents de prestidigitateur. Des témoignages rapportent ici l’image d’un homme enseignant des dizaines de jeunes en guenilles et leur organisant des activités sportives. En 1887, Paulin Enfert crée « officiellement » le Patronage Saint Joseph de la Maison Blanche.
Deux ans plus tard, ce dernier prend un essor considérable lorsque M. Jules Nolleval, un généreux donateur, met à disposition du groupe, un terrain de 2 000 m² situé rue Bobillot (l’une des rues mêmes où se situent certains des établissements actuels de l’association). Désormais, Paulin Enfert y réunit les enfants du quartier et accueille également des orphelins qu’il met en apprentissage.
Naissance de La Mie de Pain
En décembre 1891, de jeunes membres du patronage cherchent à aider les personnes défavorisées. En voyant une femme donner des miettes de pain aux oiseaux, l’un d’eux suggère qu’en « dégotant beaucoup de mies de pain, mais des grosses, on pourrait nourrir des gens ! » Ainsi est retenue l’appellation La Mie de Pain…
• 1891 : La première soupe populaire est organisée à l’occasion de Noël. Depuis, sa distribution a lieu tous les soirs de l’année.
• 1895 : Les activités se diversifient. Le patronage se poursuit pour les plus jeunes (activités physiques, intellectuelles, culturelles, religieuses). Pour les autres, divers aménagements se mettent en place : le vestiaire des pauvres, les consultations médicales gratuites, le secrétariat des pauvres.
• 1932 : Le premier dortoir permettant l’accueil de nuit est mis en place. Il accueille 300 sans-logis.
Le début du 20ème siècle
En 1920, La Mie de Pain est constituée en « association loi 1901 ». Malgré le décès de Paulin Enfert deux années plus tard, les activités continuent de se développer dans le même esprit. En 1932 est financée la construction du premier centre d’hébergement d’urgence (ouvert pendant l’hiver) d’une capacité de 300 places. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, ce centre accueillera jusqu’à 700 personnes.
De 1945 à nos jours
A compter de 1945, La Mie de Pain recueille les « clochards » rejetés par la société. Mais elle ne perd pas de vue son objectif d’éducation des plus jeunes. C’est ainsi qu’en 1969, est édifié le Foyer des Jeunes Travailleurs, comptant alors 108 lits.
La précarité a changé, et revêt désormais des formes différentes. La Mie de Pain adapte alors ses prestations et ses structures. En 1987, le centre d’hébergement d’urgence désormais appelé Le Refuge, est modernisé.
Les activités de l’association se développent de plus en plus dans le domaine de l’accompagnement social et de l’insertion socio-professionnelle. Les conventions de fonctionnement et de financement établies avec les pouvoirs publics aident grandement aux activités poursuivies par l’association.
Paulin Enfert a reçu de son vivant le Prix Montyon de vertu à deux reprises (en 1892 puis en 1915). La Mie de Pain a également reçu la Médaille d’Or de l’Exposition Universelle de 1900.
Plus près de nous, La Mie de Pain a été reconnue d’utilité publique en 1984 et a reçu la Médaille Internationale Humanitaire en 1991 ainsi que le Prix de l’Académie Française.
Enfin, l’association possède depuis 2010 l’agrément du Comité de la Charte du Don en Confiance qui reconnaît sa bonne gestion et son bon fonctionnement.
* La Bièvre est un affluent de La Seine. Elle était la deuxième rivière parisienne jusqu’en 1912 traversant alors le 5ème et 13ème arrondissement. Elle a depuis été recouverte sur toute la longueur de son parcours urbain.
** Un moulin à tan est une usine où l’on broie l’écorce de chêne qui sert au tannage des peaux. Le terme vient du gaulois « tann » qui signifie chêne.
L’histoire de La Mie de Pain en vidéo
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